Le COVID19 déclenche la Guerre du Pétrole entre la Russie, les pays de l’OPEP et les Etats-Unis

La pandémie du COVID 19 au-delà de la crise sanitaire mondiale a également engendré une crise majeure importante dans le domaine Pétrolier. Une Crise pétrolière reléguée au second plan du fait de l’urgence sanitaire.
En effet le lundi 9 mars 2020 les cours du pétrole sur le marché ont chuté à environ 33 dollars le baril (un niveau jamais atteint depuis 2016). Une baisse de près de 25% par rapports au cours des jours antérieurs. Il est à noter que depuis fin 2019 les cours du baril de pétrole se situent entre 55 et dollars et 65 dollars le baril.
Les spécialistes sont unanimes à reconnaitre que cette chute du lundi 9 mars 2020 est la plus forte baisse enregistrée depuis 1980 date de la création du marché. L’économie mondiale en pareil circonstance (crise pétrolière) devrait en être bénéficiaire, puisque la baisse des prix du baril profite aux entreprises et aux consommateurs.
L’échec des négociations entre l’Arabie Saoudite et la Russie déclenche la guerre de l’offre
La crise sanitaire que vit le monde a impacté de façon drastique la demande mondiale de pétrole, en raison de la baisse des activités des entreprises en Chine, en Amérique et en Europe. Afin de faire face à la situation, l’Arabie Saoudite a convoqué une réunion de crise de l’OPEP+ (pays producteur + la Russie). Cette réunion avait pour but essentiel de convaincre les pays producteurs de pétrole de baisser leurs productions jusqu’au niveau de la demande pour faire remonter le prix du baril. Il faut préciser que le budget de l’Arabie Saoudite est composé à 90% des revenus du pétrole. Cette baisse des prix prive Ryad de colossaux revenus. L’objectif de cette réunion de crise était de trouver une réponse à une baisse des cours du pétrole provoquée par le covid19 et ses effets sur l’économie mondiale puisque la Chine épicentre de la pandémie représente environ 14% de la demande mondiale de pétrole.
Sur la base d’entente depuis 2016 l’Arabie Saoudite et la Russie s’étaient accordés à limiter leur production pétrolière, en vue de maintenir un niveau de prix correct du baril de pétrole. Pour Ryad en vue de faire face à la crise il faut négocier avec la Russie afin qu’elle limite sa production à 500 000 barils jour et l’Arabie Saoudite 1 million de barils jour.
Refus catégorique de la Russie qui irrite Ryad, et qui dans la foulée annonce une nouvelle stratégie par une augmentation de sa production. Cette stratégie fait chuter le prix de baril de 10% le même jour et de 25% le lundi 9 mars 2020. Certains spécialistes annoncent même que le prix de 30$ le baril de 2016 pourrait être atteint ultérieurement.
L’accord entre Ryad et le Russie sur la réduction de la production expire fin mars, les pays producteurs pourront alors augmenter à l’instar de Ryad leur production afin de maintenir leurs recettes et éviter la récession et les chocs budgétaires. Chaque producteur pour maintenir sa part de marché serait amené à augmenter sa production et baisser ses prix.
Une situation qui ressemble fort bien à celle de 2014-2015 où le baril du pétrole était passé de 110$ à 35$.
D’ores et déjà Aramco en Arabie Saoudite entend saturer le marché de pétrole dès le mois d’Avril avec environ 13 millions de barils jour quand prendra fin les engagements de l’OPEP+ et ce afin de prendre ses concurrents à court. Quant au Émirats Arabes Unis ils passeront à 4 millions barils jour, la Russie elle se prépare à produire environ 12 millions barils jour. Sans compter les autre États producteurs qui surement essayeront de garder leur part de marché en augmentant également leur production.
Le refus de la Russie ou une guerre énergétique contre les États-Unis alliés de l’Arabie Saoudite
Les spécialistes mettent en avant un jeu géostratégique entre la Russie et les États-Unis dans le domaine énergétique. En effet la stratégie de la Russie est de faire baisser les cours du pétrole afin que les gisements de schiste américains ne soient plus rentables, une réponse aux sanctions américaines contre le gazoduc Nord Stream 2. Ce qui fera dire à la spécialistes de géopolitique Alexandra Allio De Corato dans des tweets « Le Kremlin a décidé de sacrifier l’alliance OPEP + pour arrêter les producteurs américains de pétrole de schiste et pour punir les États-Unis qui souhaitent sanctionner le gazoduc Nord Stream 2. Poutine mise sur la fragilité financière des pétroliers américains. Le pétrole de schiste demande en permanence de réinvestir des capitaux – il faut forer beaucoup plus souvent que dans le conventionnel – et les entreprises sont sous forte pression financière ».
En effet la position russe vise à réduire la production de pétrole non conventionnel (gisements de schiste) américain qui refait des États-Unis premier producteur mondial avec
une production d’environ 12 millions de barils jours.

Cependant la Russie consciente de l’exploitation onéreuse des gisements de schiste aux États-Unis parie sur la baisse des coûts du pétrole afin de décourager les investisseurs dans le domaine. Selon le cabinet Rystad « l'effondrement sans précédent depuis près de trente ans des cours du brut va forcer les compagnies pétrolières à réduire leurs investissements de façon rapide et massive. Les dépenses d'exploration-production pourraient chuter de 15 % cette année si le baril reste aux alentours de 30 dollars, (le Brent s'échangeait à 36 dollars mercredi après-midi, en recul de 3 %) soit une coupe drastique de 100 milliards de dollars. »
Et selon Audun Martinsen analyste de ce cabinet basé à Oslo, « En deux ans, 250 milliards de dollars de commandes risquent de disparaître. Enfin, les analystes d'UBS estiment quant à eux que « Inévitablement, les prix plus bas vont conduire à une réduction des investissements ».
La faible riposte des États-Unis
Cette chute des cours du pétrole qui pourrait porter un coup dur à l’industrie pétrolière des États-Unis a fait réagir le gouvernement américain qui envisage une aide des industries pétrolières non conventionnelles américaines. Le Washington Post dans sa parution du mardi 10 mars 2020 de préciser : « La Maison-Blanche devrait continuer à soutenir les entreprises de pétrole et de gaz de schiste frappées par la chute de cours du pétrole et la récession liée au coronavirus ». Selon le Washington Post L’aide fédérale pourrait se faire sous forme de crédit à très faible taux d’intérêt. Une idée qui selon le Washington Post n’est pas du goût des démocrates dont le sénateur de New York Chuck Shumer fustige le gouvernement en s’inquiétant du fait, que le gouvernement prête davantage d’attention à des intérêts particuliers qu’aux citoyens, rappelant ensuite que certains Américains « ne peuvent pas savoir s’ils sont malades » car les médecins manquent de kits de dépistage. Le manque d’unité autour ce plan de riposte du gouvernement fragilise de ce fait la riposte américaine quand on sait l’unanimité de la classe politique américaine en ce qui concerne les relations extérieures. Le schiste américain à en croire plusieurs spécialistes ne sera pas à mesure de résister à cette crise pétrolière en cours qui pourrait connaitre un pic en Avril (avec la fin des accords entre États producteurs de l’OPEP+). Cela se traduit dans les annonces des grands groupes opérants dans le secteur aux États-Unis. Les premières coupes dans les plans d'investissement arrivent, avec le géant Occidental Petroleum qui a annoncé le 10 mars qu'il réduirait son capex 2020 de plus de 30%, quant Diamondback Energy, Parsley, Marathon Oil avaient annoncé la veille prévoir de réduire l'activité et les investissements. Globalement, la production américaine pourrait baisser de 20%, estime Scott Sheffield, le patron de Pioneer, l’un des producteurs importants de pétrole de schiste.
Le coronavirus, en impactant lourdement la demande pétrolière, par la baisse de l’activité économique et des transports (paralysie du fret international, de la production industrielle et du tourisme) a réussi à mettre fin à l’OPEP+, qui réunit depuis 2016 l’organisation des pays exportateurs de pétrole et Dix pays partenaires. Le marché pétrolier n’avait pas suffisamment anticipé l’ampleur de cette maladie devenue pandémique. Le confinement et diverses quarantaines devraient accentuer la stagnation de la demande de pétrole. Pire la première puissance économique mondiale les États-Unis s’enfonce dans la crise du Covid19 avec près de 125 000 cas confirmés au 29 mars 2020 faisant d’elle le pays dans lequel on enregistre le plus grand nombre de contaminés au Covid19.